Encore un rebondissement sur la législation CBD ! Un nouvel arrêté (disponible ici) du ministère des solidarités et de la santé vient d’être publié au journal officiel de la république sur proposition de la directrice générale de l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Qu’est-ce-que cela change ?
I. Le décret modifie les règles sur l’exploitation du plant de chanvre
Premier élément d’importance sur cette nouvelle législation CBD, le décret va permettre l’émergence d’une filière agricole autour des extraits de chanvre. Jusqu’à présent, seule l’exploitation des tiges et les graines était autorisée par la législation et par conséquent les agriculteurs français étaient tenus de détruire les sommités florales (partie la plus riches en cannabinoïdes). Dorénavant, les agriculteurs (enregistrés comme tels) vont pouvoir faire le commerce de ces fleurs sous réserve de plusieurs conditions.
Tout d’abord, ils doivent faire la culture de variétés de cannabis Sativa L. inscrites au catalogue Européen et de plants issus de semences certifiées (la pratique du bouturage est interdite).
Ensuite, ces plants ne devront pas contenir plus de 0,3% de THC. Cette limite de THC contenu dans la plante est accompagnée d’une procédure de calcul de cette concentration. Il s’agit là d’une avancée importante car les résultats obtenus dans le passé pouvaient différer grandement d’une méthode à une autre. Comme nous raisonnons là sur des quantités après la virgule, le risque est grand pour les agriculteurs de se retrouver au delà de la cette limite et de basculer par la même occasion dans le trafic de stupéfiants.
Enfin, les fleurs seront revendues pour la production d’extraits de chanvre à des fins industrielles avec l’aide d’un contrat liant producteur et acheteur avant la culture. Ce contrat précisera les volumes attendus et le prix.
Avec cette évolution de la législation CBD, l’agriculture française va enfin pouvoir tirer un revenu de l’ensemble du plant de chanvre. La qualité, l’impact écologique et la traçabilité des produits seront par conséquent améliorés.
II. Le décret interdit la vente de fleurs brutes et de feuilles brutes.
Si les agriculteurs pourront faire le commerce de l’ensemble de la plante de chanvre, cela sera uniquement à des fins industrielles !! En effet les fleurs brutes ou les feuilles brutes ne pourront être revendues auprès des consommateurs et ce sous quelque forme que ce soit. Ainsi le commerce ou la détention de fleurs brutes ou de feuilles brutes de chanvre sont désormais interdits. La législation CBD se durcit sévèrement !
Ce décret sonne comme une bombe pour les revendeurs de fleurs de CBD en France (CBD shop et buralistes). On estime à environ 700 à 800 boutiques spécialisées (shop de CBD) et à environ 3000 buralistes qui revendent des fleurs. Le commerce d’un CBD shop étant réalisé à 80% par le business des fleurs, c’est un modèle économique qu’il faudra complétement revoir pour subsister. Cette décision aurait été prise car les forces de l’ordre ne sont pas en capacité de distinguer facilement (sans analyse) des fleurs de CBD de fleurs de cannabis lourdement chargées en THC. On entend également qu’il s’agirait d’une mesure de santé publique puisque les fleurs seraient principalement fumées.
Un certain nombre de recours ont été déposé par les acteurs de la filière et l’avis du conseil constitutionnel doit être rendu le 7 janvier prochain afin que la législation CBD maintienne leur activité.
III. Autorisation des extraits de chanvre dans les produits finis
Il est également précisé dans cet arrêt que les extraits de chanvre et les produits qui les contiennent, ne doivent pas excéder 0,3% de THC. Les produits finis trouvent donc enfin un cadre légal. La législation CBD autorise le cannabidiol dans les produits de vapotage. Cependant, le cadrage pour l’utilisation de ces extraits dans l’alimentation et les cosmétiques CBD n’est pas évoqué de manière précise, comme le réclamait pourtant de nombreux acteurs depuis plus de 2 ans. En conséquence, il ne sera toujours pas possible d’enregistrer les produits comme compléments alimentaires faute de dose journalière recommandée, de type d’extrait à utiliser, de réglementation sur l’étiquetage de mise sur le marché….etc
En conclusion, ce décret ouvre des perspectives pour les agriculteurs français qui vont pouvoir enfin commercialiser la totalité de la plante et permettre ainsi l’émergence d’une filière française. En revanche, une législation CBD complète, comme demandé dans le rapport sur les différents usages du cannabis rendu par Robin Reda (LR) en Juin 2021, y compris sur l’usage récréatif et sur le CBD bien être manque toujours. Il s’agirait pourtant d’harmoniser la réglementation Européenne applicable au Cannabidiol sur le sol français et ainsi de permettre à l’ensemble des acteurs de jouer à armes égales.
Notre activité repose sur un marché nouveau et la législation CBD va souvent moins vite que la réalité.